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Solidarité avec les manifestant-e-s de Hong-Kong!

Solidarité avec les manifestant-e-s de Hong-Kong!

Depuis le mois de septembre, les étudiant-e-s hongkongais-e-s sont les fers de lance d’une lutte pour la démocratie dans l’île. Face à la demande pour l’élection au suffrage universel des dirigeant-e-s de la région administrative spéciale de Hong Kong, le pouvoir Chinois cherche à maintenir son emprise en contrôlant les candidat-e-s soumis-e-s au vote par le biais d’un « comité de sélection » de 1200 personnes aux ordres de Pékin.

Les manifestant-e-s ont occupé et bloqué certains quartiers de la ville, paralysant l’activité économique. Les autorités de Hong Kong ont fait usage de la plus grande brutalité policière pour faire reculer le mouvement, tandis que le pouvoir central de Pékin compte sur le pourrissement du mouvement.

Solidaires Etudiant-e-s affirme sa solidarité avec les manifestant-e-s dans leur lutte contre les autorités de Hong-Kong et le pouvoir Chinois, pour une démocratie réelle.

Nous avons souhaité diffuser une prise de parole de Vince Tao, hongkongais militant à Montréal au sein de l’organisation No One Is Illegal qui affirme une solidarité critique en donnant une lecture fine des événements qui ont cours. Ce discours a été prononcé à l’occasion d’une manifestation en soutien aux étudiant-e-s hongkongais-es, le 2 octobre 2014 à Montréal (Québec).

« Salut tout le monde, je m’appelle Vincent Tao et je suis membre de No One is Illegal Montréal1.

Je crois que ça devrait être notre priorité ici de nous opposer à l’utilisation éhontée de forces de polices violentes en réponse aux manifestations de ce lundi dans le centre-ville de Hong-Kong. Si la démonstration la plus récente de brutalité étatique est évidemment épouvantable, elle est tout sauf “surprenante“ à l’époque où nous vivons. Malheureusement, c’est ce à quoi nous devons nous attendre quand le peuple descend dans la rue et tente d’exercer son droit à occuper l’espace public dans n’importe quel hub de la finance mondiale, les gens se heurteront inévitablement à l’extrémité contondante d’une matraque de police. De Montréal à Hong-Kong, les polices du monde entier mènent une course unilatérale à l’armement contre les gens – tandis que nous ramassons des parapluies et des bouteilles, les flics brandissent chaque jour des machines de guerre plus grosses et plus performantes. Qu’un manifestant décide de casser une fenêtre ou de ramasser leurs poubelles, nous devons dénoncer la brutalité policière quelle que soit sa forme et l’endroit où elle s’exerce : toute brutalité policière est excessive.


Je suis fils de Hongkongais (je suis Hongkongais), donc je peux difficilement décrire le mélange de sentiments de nostalgie et d’identification que j’ai ressenti la première fois que j’ai vu les images de la place Victoria remplie de gens de mon âge marchant pour ce en quoi ils croient. Mais l’avalanche de reportages est venu se déverser par-dessus, rendant le message transmis par ces images à la fois terriblement déformé et douloureusement clair. Du Times à The Economist, les médias occidentaux sont obsédés par l’imaginaire d’un Hong-Kong propre et réputé pour son ordre, la carte postale d’un centre financier mondial, décrit avec la nostalgie de l’époque où la ville était sous l’administration coloniale de l’empire britannique. Dans un double mouvement, cette presse ressort le discours éculé du “péril jaune“, cette menace récurrente d’une Chine fondamentalement non-démocratique et systématiquement rétrograde. Au même moment, les journalistes perpétuent les stéréotypes en présentant les manifestants d’Occupy Central comme une “minorité modèle“, une image stratégiquement mobilisée pour disqualifier les actions antiautoritaires de nos frères et sœurs noirs de Ferguson et d’ailleurs.

Contrairement à l’idée selon laquelle ce serait la première fois dans l’histoire de Hong-Kong que “les gens se coordonnent eux-mêmes avec peu d’indications du gouvernement ou des institutions“, avec une exceptionnelle diffusion de la bien-pensance de la classe moyenne au passage, nous ne devons pas oublier qu’en mai 1967, les jeunes de la génération de mon père ont posé des bombes à l’époque de la lutte pour l’obtention de conditions de travail décentes et d’une politique sociale de la part de l’administration coloniale négligente.

Ce qui ne doit pas être effacé ici c’est la longue histoire du militantisme ouvrier, des mobilisations populaires et des manifestations à Hong-Kong. Mais plus important encore, j’ai peur que dans notre célébration pressée du mouvement pro-démocratie, nous effacions le contenu réel du mot “démocratie“. Ce qui est obscurci par le flot d’images de jeunes étudiants marchant pacifiquement dans les rues c’est le fait que les 7 millions d’habitants de Hong-Kong ne sont pas tous des futurs titulaires de MBA (Master of Business Administration) aux yeux brillants ou des potentiels gestionnaires de hedge funds2. Dans les dépêches sur les manifestations nous arrivent en ce moment même, pourquoi n’y-a-t-il pas mention des effroyables écarts de revenus à Hong-Kong ; sur le fait qu’une personne sur cinq vit en-dessous du seuil de pauvreté parmi la population de l’île ; sur le fait que les taux de suicides dans les quartiers les plus pauvres sont 3,5 fois plus élevés que dans les quartiers financiers adjacents ? Quand la soi-disant prospérité de Hong-Kong est mesurée par la montée en flèche des prix de l’immobilier, c’est une triste réalité de voir que la retransmission télévisée de l’appel pour la démocratie d’Occupy Central ne fait aucune mention de revendications pour le logement public.

Donc laissez-moi vous demander : pour qui est vraiment cette “démocratie“ ? Est-ce que le suffrage universel sera étendu aux travailleurs étrangers d’Indonésie, des Philippines, du Népal, de Thaïlande et du Bangladesh qui constituent 10% de la main-d’œuvre de l’île ? Quand Leung Chun-ying sera chassé en tant que président de la ville, est-ce qu’il sera mis fin à la “règle domestique“ et à la “règle des deux semaines“3 qui contraignent les femmes migrantes à vivre dans un état d’esclavage validé par l’Etat ? Quand Hong-Kong atteindra la « vraie démocratie », est-ce que justice sera rendue pour Erwania, une domestique de 23 ans qui a été découverte il y a tout juste un an vivant dans une cage et torturée par ses patrons ? Quand les travailleurs migrants doivent garder le silence face à la montée des abus verbaux, physiques, sexuels de la part d’employeurs avec lesquels ils doivent vivre dans la peur d’une expulsion imminente, comment peut-on parler de démocratie ?

Il est urgent que vous vous demandiez : qu’est-ce qui est en jeu dans le soi-disant mouvement pro-démocratie de Hong-Kong, et qui est-ce que représente Occupy Central ? Est-ce que le suffrage universel pour Hong-Kong signifie juste le suffrage universel pour la classe moyenne des “chinois de Hong-Kong“ ? Je suis convaincu que la démocratie est en faillite sans justice et dignité pour tout le monde. »

*Toutes les notes sont des traducteurs.

1 No One is Illegal est une organisation Canadienne, voici sa présentation : « La campagne Personne n’est illégal fait partie d’un mouvement mondial de résistance et de lutte collective pour l’autodétermination des personnes migrantes et des peuples autochtones. Nous luttons afin de faire partie du mouvement de résistance qui grandit à l’intérieur des murs de la Forteresse Amérique du Nord. Nous reconnaissons que les luttes pour l’autodétermination et la libre circulation des peuples contre l’exploitation coloniale sont menées par les communautés qui combattent depuis les lignes de front. La campagne Personne n’est illégal, à titre de participante et d’alliée, appuie concrètement ces luttes. Ce faisant, nous cherchons à contribuer au développement d’un mouvement global pour la justice et la dignité, tout en tissant des liens entre les communautés en résistance dans nos régions et partout dans le monde. ». www.facebook.com/NoOneIsIllegalMontreal

2 Fonds d’investissement à vocation spéculative. Ce sont des fonds au cœur des mécanismes destructeurs de la finance actuelle, qui brassent des milliards de dollars pour le profit de quelques uns.

3 Selon la loi Hongkongaise, les travailleurs/euses domestiques étranger-e-s doivent vivre avec leurs employeurs, et si ils ou elles sont viré-e-s ou démissionnent, ils/elles ont deux semaines pour retrouver un contrat, sinon ils/elles sont expulsé-e-s du pays.

Plus d’infos : http://hkhelperscampaign.com/en/scrap-the-2-week-rule/

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