Avec la réforme de la procédure disciplinaire dans les universités, le ministère tente de museler disciplinairement les étudiant-e-s.
Lors du Conseil National de l’Enseignement Supérieur et de la Recherche (CNESER) du 14 janvier 2020, un projet de décret modifiant la procédure disciplinaire à l’encontre des étudiant·e·s a été examiné et rejeté par 20 voix et 6 abstention. Le ministère entend créer une nouvelle infraction : l’« atteinte à la bonne réputation de l’université », alors qu’à l’heure actuelle seul un « trouble au bon fonctionnement de l’université » peut être sanctionné.
Cette nouvelle infraction à la formulation particulièrement floue empêchera toute critique émanant des étudiant-e-s. Toute expression d’une opinion négative pourra réglementairement constituer une atteinte à la bonne réputation de l’université et autoriser l’établissement à engager des poursuites, que ce soit pour réellement sanctionner ou simplement faire peur et taire les usager-e-s. Nous pourrons être poursuivi-e-s par exemple lorsque nous dénoncerons les double-langages, l’accentuation de la sélection sociale (parfois au dehors de toute légalité), ou bien lorsque produirons des témoignages contre des enseignants harceleurs ou agresseurs et dénoncerons le soutien ou l’inaction des présidences d’université.
Cette tentative de muselage, cette nouvelle arme entre les mains des présidences d’établissement, ne sort pas du chapeau de la ministre. Elle répond à la récente campagne de presse orchestrée sur le thème « on ne peut plus rien dire à l’université, les libertés académiques sont en danger », regrettant que des étudiant-e-s se soient mobilisé-e-s contre des événements diffusant sans contradiction et en dehors de tout cadre scientifique des discours racistes, sexistes, validistes ou transphobes.
Un décret manifestement illégal
Ce projet de décret rentre en contradiction avec l’article L811-1 du Code de l’Éducation qui garantit aux étudiant·e·s la « liberté d’information et d’expression […] à titre individuel et collectif». Les seules limites à ce droit sont les dispositions visant à assurer le bon déroulé des activités d’enseignement et de recherche ainsi qu’à éviter les troubles à l’ordre public. Par conséquent, le décret est en contradiction flagrante avec la loi. Frédérique Vidal entend-elle changer la loi et nous retirer la liberté d’information et d’expression pour légaliser son décret ?
La respectabilité des universités ne dépend pas de nous !
La fédération Solidaires étudiant-e-s, syndicats de lutte, assume mettre en danger la réputation des universités dès lors qu’elles ont ou promeuvent, activement ou par leur passivité, des pratiques légales ou illégales, sexiste, raciste, validiste, transphobe, de sélection sociale, etc. Nous exigeons le retrait de ce projet de décret et la mise en place d’une véritable réflexion pluraliste sur les procédures disciplinaires.