Communiqué commun Solidaires étudiant-e-s et Sud Éducation – 10 mai 2020
Le 16 mars, les universités de la France entière se sont brusquement arrêtées. Elles ont dû en un temps record s’adapter à la nouvelle situation du confinement, adapter leurs cours et surtout adapter leurs modalités d’évaluation. Alors que la pétition nationale « Non aux examens en ligne qui creusent les inégalités dans l’enseignement supérieur !« 1, soutenue par un grand nombre d’organisations syndicales et de collectifs, a recueilli près de 9000 signatures, partout sur le territoire, les établissements d’enseignement supérieur se préparent à faire passer des examens en ligne.
Tout en continuant à réclamer la validation automatique de ce semestre pour tou-te-s, nous nous inquiétons aujourd’hui des modalités d’examen prévues par les établissements d’enseignement supérieur. En effet, les fiches informatives 5 et 6 du Ministère de l’Enseignement Supérieur et de la Recherche2 ouvrent la voie à des examens télé-surveillés. Ce type de pratiques existe depuis quelques années, mais jusqu’ici il n’a été utilisé que dans quelques facs. Cependant, le contexte actuel pousse un certain nombre d’établissements à tenter l’expérience. Il s’agit de contrôler les étudiant-e-s à distance, donc de relever leur identité, les surveiller via logiciel mouchard et webcam voire même en doublant avec la caméra du smartphone, leurs faits et gestes pendant le partiel.
Alors que beaucoup d’étudiant-e-s n’ont pas accès à du matériel informatique ou une connexion de qualité, alors que nombre d’entre elles et eux n’ont pas d’espace personnel pour travailler et être seul-e, un examen en temps limité surveillé par webcam ne paraît pas envisageable, sauf à rompre avec le principe d’égalité élémentaire. De plus, ce type de solutions demande un équipement performant, même quand on a un ordinateur à disposition : la grande majorité ne dispose pas d’ordinateurs puissants, ou de connexions suffisantes. Par ailleurs, un certain nombre d’étudiant-e-s sont rentré-e-s dans leur famille et se retrouvent dans des zones « blanches », avec une connexion très faible voire inexistante.
En termes de données personnelles, le Règlement Général de Protection des Données (RGPD) est clair sur la question : les données personnelles des utilisateur-ice-s ne peuvent être collectées qu’avec leur plein gré. Il est évident que les étudiant-e-s qui sont obligé-e-s de passer leur partiel ne pourront donner leur accord librement pour être filmé-e-s et enregistré-e-s, ni voir leurs données personnelles collectées par une entreprise privée ou la fac (identité, photo, images d’intérieur de leur lieu de vie…).
Aujourd’hui nous le disons : nous n’acceptons pas que la surveillance technologique de toutes et tous se généralise jusque dans les foyers. Une grande partie des étudiant-e-s ne peut tout simplement pas accéder aux moyens techniques permettant de mettre en œuvre une telle solution, et les autres n’ont pas à se voir obliger une captation aussi importante des données personnelles. L’organisation d’examens télé-surveillés va contre le principe d’égalité et contre les normes les plus basiques de protection des données.
Nous le répétons : la seule solution valable pour tou-te-s est la validation automatique et la neutralisation du semestre ! Si les établissements d’enseignement supérieur souhaitent malgré tout mettre en place une évaluation finale, nous demandons que celle-ci se fasse sans surveillance et de manière asynchrone, pour permettre à toutes et tous de valider.
2 Les fiches informatives, circulaires et ordonnances concernant l’adaptation de l’Enseignement Supérieur et de la Recherche au confinement sont disponibles ici : https://services.dgesip.fr/T712/covid_19