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A propos du financement de Polytechnique et d'annonces ministérielles

A propos du financement de Polytechnique et d'annonces ministérielles

« Agir pour davantage de mixité sociale c’est refuser que la recherche de l’excellence passe par le sacrifice de la grande majorité », a déclaré la Ministre de l’Education à l’Assemblée Nationale, revêtant pour l’occasion son habit « socialiste ». Mais sérieusement, qui croit encore qu’il s’agit là d’autre chose que de belles paroles ?

Regardons ce que le gouvernement a fait pour la « mixité sociale » dans l’enseignement supérieur.

Dans le courant du mois de décembre, le gouvernement s’est engagé à doubler l’aide accordée à l’école polytechnique, soit une augmentation de 60 millions d’euros. Cette somme est environ celle de l’augmentation du budget des universités françaises annoncée par le CNESER la même semaine (65 millions d’euros).

Le gouvernement assume donc clairement que 2700 polytechnicien-ne-s, déjà extrêmement favorisé-e-s, comptent autant, voire plus, que 1.5 millions d’étudiant-e-s dont les facs. Il acte ainsi encore un peu plus (si c’est possible) l’élitisme qui gangrène l’enseignement supérieur.

Si vous vous demandez comment une école qui nage déjà dans les investissements privés peut voir ses aides étatiques doubler, c’est en particulier parce les élèves de l’X sont fortement incité-e-s à devenir haut-e-s fonctionnaires, les mêmes qui « conseillent » les ministres sur les budgets à allouer, et les coupures à faire, dans les universités comme par hasard.

C’est d’autant plus inacceptable que les dirigeants de ce genre de structures élitistes reconnaissent pleinement le défaut de moyen que rencontrent les universités françaises, mais continuent à tout faire pour capter le peu de fonds que le gouvernement accepte de filer, via les mascarades que sont les « initiatives d’excellence » (IDEX) ou les « laboratoires d’excellence »(LABEX).

Si vous vous demandiez ce que voulait dire le mot « corporatisme », c’est précisément ça : un vieux lobbying de corps auprès des pouvoirs publiques, dans une logique égoïste au possible pour amasser des thunes, et qu’importe si la société s’écroule autour.

Qui plus est, le discours classique sur la compétitivité de l’ESR fait souvent mine de critiquer la taille réduite des grandes écoles, et donc fait semblant de vouloir les agglomérer aux seules structures « visibles » à l’international, c’est-à-dire les universités. Mais on voit bien ce qu’il en est vraiment, puisque dans ces regroupements, c’est bien les grandes écoles qui dictent leur loi. Par exemple, la lettre de mission du Ministre de la Défense encourage l’X à se rapprocher des entités de Paris-Saclay à condition que celles-ci partagent « les valeurs de sélectivité et de gouvernance ». Si vous êtes à Paris Sud, c’est votre fac qu’ils aimeraient gouverner.

C’est ça que le gouvernement fait de l’ESR, laisser s’écrouler les facs, dilapider toujours plus de fric dans une myriade de grandes écoles (pour juste une poignée d’élèves, en général issu-e-s des classes supérieures, donc déjà bien avantagé-e-s par la vie) tout ça pour avoir des « fers de lance de l’excellence », pour faire les marioles dans des multinationales, des start-up, ou des cabinets ministériels.

On réaffirme notre opposition au principe élitiste des grandes écoles : la sélection, c’est une histoire de classe. Même lorsqu’elles se prétendent « républicaines » ou « égalitaristes » (si si, elles le prétendent…), certaines écoles (presque) gratuites aux concours (presque) gratuits, type ENS1, sont maintenues, et se maintiennent, au-dessus d’un plafond de verre que très peu arrivent à franchir : la méritocratie, c’est un truc inventé pour justifier l’élitisme. Pour faire croire que s’il y a une poignée d’enfants de classes populaires parmi les reçu-e-s aux grandes écoles, c’est que les autres n’avaient qu’à mieux travailler. Le système, lui, ne pose aucun problème.

On rappelle donc à l’État de financer les universités comme il se doit, car les financements propres par le privé voulu par les lois LRU et Fioraso, ça ne marche que pour les grandes écoles, et accentue donc la sélection. Si l’ESR est en perdition, ce n’est pas faute « d’excellence », mais c’est à cause du désengagement des pouvoirs publics dans l’éducation du plus grand nombre, qu’un gouvernement qui n’a plus de socialiste que le nom, ose déclarer comme sa priorité. En se foutant quand même bien de notre gueule.

1L’ENS est la grande école qui contient la part la plus importante de boursier-e-s – bien inférieure, évidemment, à la part de boursier-e-s en universités ou en BTS, IUT, etc. De plus, ces boursier-e-s sont souvent à faibles échelons et appartiennent aux fractions « culturelles » de la petite bourgeoisie : enfants d’instituteurs, de professeurs du secondaire, etc. La sélection ne se fait pas seulement sur la base des ressources économiques, mais aussi des ressources culturelles (est-ce que les parents peuvent aider à faire les devoirs, à comprendre les subtilités d’APB et des hiérarchies de l’enseignement supérieur, etc.)

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