Ce 3 octobre, les médias Médiapart et Marsactu publiaient une longue enquête sur la « marchandisation » des diplômes de l’Institut d’Études Politiques d’Aix-Marseille.1
Quand des établissements privés délivrent un diplôme d’État
Depuis 2008, l’IEP d’Aix-en-Provence multiplie les partenariats avec des organismes de formation privés français ou étrangers. Le principe est simple : moyennant une part sur les vertigineux frais d’inscriptions pratiqués par ces organismes, ceux-ci délivrent un « Master d’études politiques » de l’IEP d’Aix. Ces partenariats concernent essentiellement des masters en management et marketing : des formations bien éloignées des formations originelles d’un IEP (science politique, carrières publiques…).
Une conséquence du désengagement de l’État
Outre l’«ouverture sur le monde privé » affichée par la direction, cette politique est un apport financier important pour un IEP qui connaît de sérieux problèmes budgétaires : pas moins de 700.000 euros de budget en 2013 ! Une rentrée non négligeable puisque, comme tout établissement d’enseignement supérieur, l’IEP subit un désengagement financier important de l’État depuis 2008 et la loi LRU.
« Sciences Po », une marque à vendre
L’IEP d’Aix met ainsi en vente son nom et sa capacité à délivrer des diplômes d’Etat pour maintenir et augmenter son budget, devenant une simple « agence de diplomation », sans aucun contrôle pédagogique sur ses partenariats. Ainsi, plus de 40% des diplômé-e-s 2013 de l’IEP le sont via ces partenariats, et malgré le fait que la majorité d’entre elles et eux n’ont jamais croisé un-e enseignant-e-chercheur-euse de l’IEP !
Un phénomène plus global
La « polémique » à l’IEP d’Aix n’est que la partie émergée de l’iceberg. Ce phénomène est plus global : de nombreux établissements privés nouent des conventions avec des établissements publics pour délivrer des diplômes d’État, alors que le contrôle pédagogique de l’établissement public est rare. Les établissements privés n’hésitent pas à jouer de la concurrence entre les universités, induite par la loi LRU et confirmée par la loi ESR : en atteste l’ouverture d’une nouvelle chaire à l’IEP de Bordeaux financée par l’industrie de l’armement, à savoir le conglomérat Dassault – Safran – Thalès2, et les risques sérieux que fait peser ce financement sur un enseignement public critique à l’IEP. A Lille, faute de conventions, le rectorat peut menacer de valider les diplômes par jury rectoral, sans parler que des établissements privés sont admis comme membres des « Communautés d’Universités et d’Établissements » (la « Catho » ou FUPL à Lille par exemple).
Luttons contre la marchandisation de l’enseignement supérieur
Solidaires Étudiant-e-s revendique une université publique, gratuite et ouverte à toutes et tous, qui ne laisse aucune place aux « formations » privées. Nous refusons que les formations universitaires ou pire, les diplômes et « marques », soient vendues à des organismes privées dont l’unique objectif est la rentabilité et qui n’ont aucun souci de la formation des étudiant-e-s et des conditions de travail des personnels.
1http://www.mediapart.fr/journal/france/071014/les-etudiants-de-liep-daix-protestent
2http://www.fondation.univ-bordeaux.fr/chaire/defense-et-aerospatial