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Jeunes = Chômage ? ERREUR

Jeunes = Chômage ? ERREUR

 

Fiche technique

sur le jeunisme

Le Chômage des jeunes n’existe pas !

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La fédération des syndicats de luttes Solidaires Etudiant-e-s a rappelé en Juin 2013 son refus du jeunisme. Ce refus induit que nous refusons les discours qui s’appuient sur la catégorie  « Jeune ». Le jeunisme est le fait de poser comme cause centrale le fait que quelqu’un soit « Jeune » pour expliquer des traits qui lui serait spécifiques et la mise en place de politiques publiques fondées sur ces prétendues caractéristiques. Depuis des années, les politiques et certaines organisations syndicales, politiques et associatives nous répètent sans cesse à quel point il est difficile d’être jeune aujourd’hui. Nous entendons souvent les expressions de « Génération sacrifiée », « années volées »… Il ne s’agit pas, pour nous, de nier qu’il y a des différences entre quelqu’un de 60ans et quelqu’un de 25ans. Cependant ces personnes doivent-elles être traitées différemment et si oui, sous quelles conditions ?

La première question à se poser est « Qui est jeune ? ». A priori, le jeune se détermine par l’âge. Voici quelques exemples de politiques institutionnelles :

Élections

Il faut avoir 18ans pour voter et pour être éligible. C’est donc à priori l’âge où l’on devient majeur.

Emplois d’avenir

Ce dispositif du gouvernement Ayrault concerne les personnes entre 16 et 25ans. (30ans pour les personnes « handicapées »).

RSA

Le Rsa Jeune Actif concerne les personnes de moins de 25ans.

Gratuité des musées

Moins de 26ans.

Université et Sécurité sociale

La sécurité sociale étudiante est obligatoire jusque 28ans (sont en train d’allonger vers 32ans).

CPE

Il concernait les moins de 26ans

Ces quelques exemples montrent la diversité de la catégorie jeune. On y classe, en général, les personnes entre 12 et 25 ans. L’âge peut se voir repousser à 28 voir 30, 32ans. Parfois, les jeunes commencent au lycée, donc vers 15 ou 16ans, 12 ans pour certaines cartes de transport. Tous ces critères relèvent du jeunisme. En réalité, il s’agit d’une confusion entre une caractéristique démographique (ici le fait d’avoir tel ou tel âge) et une catégorie statistique utilisée par l’action publique.

Pourquoi les jeunes étudiant-es payeraient moins chers que les autres ? Pourquoi n’auraient-ils pas les mêmes droits que les autres (en termes de salaire) ? Que signifie l’instauration des emplois Jeunes ? Ces règles s’appliquent dans la mesure où l’on calque sur les jeunes des particularités : ils seraient plus précaires, moins « formés »… Il s’agit bien de fonder une unité des jeunes, une normalité des jeunes.

Les désavantages (versus avantages)

Si les tarifs étudiants ou moins de 26ans font parti des politiques jeunistes, le grand problème du jeunisme se manifeste dans les politiques économiques et sociales. Cela fonctionne un peu comme une double face d’une même politique. La catégorie Jeune est favorisé par ces tarifs avantageux (Carte SNCF, Entrées moins chères,…) mais parallèlement on ne peut être chômeur-ses en étant étudiant-e et on développe les réductions de salaires des « jeunes » en créant des dispositifs discriminants : apprenti-es, stagiaires, débutant-es… ou en réduisant les cotisations sociales ou patronales. Ces mesures sont censées « réduire le chômage des jeunes » en poussant les entreprises à embaucher ces personnes pas encore totalement prêtes au « vrai » travail.

DISPOSITIF EMPLOI JEUNE de 1997

Les contrats emplois jeunes (CEJ) sont créés en 1997 sous le gouvernement de Lionel Jospin. Ils étaient destinés aux jeunes de moins de 26 ans sans emploi et à ceux de 26 à 30 ans non indemnisables par l’Unédic. Ils visaient à développer des activités d’utilité sociale répondant à des besoins émergents ou non satisfaits. Etaient concernés les établissements scolaires, la Police nationale, les collectivités territoriales, les établissements publics et les associations. Le salaire du « jeune » était partiellement prise en charge par l’État (à hauteur de 80 % du Smic). Les contrats de travail étaient de 60 mois (éventuellement à durée indéterminée dans le secteur associatif) et à temps plein (sauf dérogation expresse).

 

Des chiffres qui font peur

Ces mesures liées à l’emploi s’appuient sur des chiffres inquiétants : 1,9 millions de 15 – 29 ans seraient sans emploi, ni formation (chiffre CAE). 24,1% des 15 – 24 ans actifs -ves seraient au chômage, soit 1 jeune sur 4 (Chiffre Insee). Plusieurs choses sur ces chiffres : Cela implique que le travail commence à 15ans à un âge où il nous semble qu’on ferait mieux d’être à l’école ou en formation. Bernard Friot1, sociologue-économiste, déconstruit ces statistiques en différenciant le taux de chômage et le poids du chômage dans cette tranche d’âge.

Le taux de chômage est le pourcentage de chômeurs dans la population dite « active» (actifves occupés + chômeurs). On peut calculer un taux de chômage par âge en mettant en rapport les chômeurs-ses d’une classe d’âge avec les actifs-ves de cette classe d’âge. De la même manière se calculent des taux de chômage par sexe, par profession et catégorie socioprofessionnelle, par région, par nationalité, par niveau de diplôme… (définition de l’INSEE2) . Chez les jeunes actif-ves, il y a 24% de chômeur-ses.

Le poids du chômage est le pourcentage de chômeur-ses pour une catégorie choisie. La part (ou le poids) des chômeur-ses chez l’ensemble des jeunes est de 7,5%.

Explicitons : « 1 jeune actif-ve sur 4 est au chômage » entend-on souvent, or 70% des Jeunes sont en formation (et heureusement!) donc considéré-es comme inactif-ves. Le taux de chômage des jeunes actif-ves est bien de 24% mais le poids du chômage, lui, est inférieur : comme la population active chez les jeunes ne dépasse pas 30%, avoir 24% des Jeunes actif-ves au chômage ça signifie que moins de 7,5% des Jeunes (actif-ves et inactif-ves) le sont. Le poids du chômage chez les Jeunes est donc inférieur à 7,5% (c.a.d. 1 Jeune sur 13), ce qui est similaire aux autres tranches d’âge ; il n’y a donc pas de spécificité du « chômage des jeunes ».

Taux d’emploi des 20 – 60ans :

En 1962 : 67%

En 2010 : 76 %

Pour nous faire peur, on nous renvoie aussi à l’argument du plein emploi, en particulier celui des « Trente Glorieuses ». Il faut rappeler que les femmes étaient très peu représentées sur le marché de l’emploi. Le plein emploi d’une époque révolue est un mythe, c’était celui des hommes. Il y a toujours eu une part de la population qui n’avait pas d’emploi jusque maintenant (ce qui ne signifie pas qu’elles ne travaillaient pas toutes, voir à ce titre les débats sur le travail des « femmes au foyer »). Il y a plus de monde qui a un emploi aujourd’hui que dans les « Trente Glorieuses ».

Un discours employé par des Syndicats étudiants, des partis politiques et des Associations

La catégorie Jeune est aussi reprise dans les discours de syndicats, partis politiques et associations. L’un des meilleurs exemple est le collectif « Retraite, une affaire de Jeunes ». Ce collectif repose sur plusieurs idées centrales : l’existence d’une spécificité Jeune et la reprises des statistiques que nous critiquons plus haut. Il s’appuie aussi sur la nécessité d’indépendance des « Jeunes » ou des étudiant-es pensé-es comme Jeunes ; idée qu’on peut retrouver dans la défense des mutuelles étudiantes.

Ce collectif a, par exemple, défendu la prise en compte des stages dans le calcul des pensions de retraites. Ce qui peut apparaitre comme une idée juste est, en réalité, une idée dangereuse et jeuniste.

En effet, cette prise en compte des stages est en creux une reconnaissance d’un type de « job » pour les jeunes en position d’étude, donc l’instauration d’une forme de rémunération hors du salaire (en stage, nous sommes indemnisé-es) pour les Jeunes dans le but de les « insérer » sur le « marché du travail ».

1Voir la vidéo de Bernard Friot « De l’importance des statistiques en politique ». : http://www.youtube.com/watch?v=VXCLQ9YLIzk
2Institut national de la stastique et des études économiques / www.insee.fr
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