Alors que la contestation contre la loi travail fait face à une répression toujours plus intense, l’annonce de 50 « mesures de simplification » par Thierry Mandon aurait pu passée inaperçue.
Des mesures qui passent à côté des principaux problèmes
On ne jouera toutefois pas le jeu de l’effet d’annonce. En effet, beaucoup des mesures annoncées sont soit minimes, soit déjà annoncées, soit déjà appliquées. Et si la plupart sont des avancées « positives », le gouvernement reste très loin de régler le principal problème des universités, à savoir le manque de moyens (manque qui finit par devenir la norme).
La dématérialisation des services universitaires
Un grand nombre de ces mesures consistent en la dématérialisation de services existants, par exemple : la constitution du Dossier Social Etudiant, les diplomes, et meme l’inscription. La dématérialisation peut etre utile notamment aux étudiant-e-s qui n’ont pas accès aux services administratifs des facs pour cause d’horaires incompatibles. Cependant, il est important de préciser que si les démarches administratives peuvent vite devenir un calvaire, c’est en premier lieu à cause du manque de moyens et de personnels accordés aux secrétariats, on a donc ici le choix de la facilité. La dématérialisation concernera également l’information des étudiant-e-s, puisque les universités vont recourir aux SMS pour informer des changements d’emploi du temps, des fermetures administratives, etc. Enfin, les universités qui ne le faisaient pas encore.
Une mesure positive…
Une mesure de taille concerne les exonérations frais d’inscription pour les non-boursier-e-s. Actuellement les universités n’ont aucune obligation d’exonérations des non-boursier-e-s. Elles ont une autonomie totale. La seule limite est « 10% maximum des étudiant-e-s non-boursier-e-s. » Les procédures sont arbitraires, discrétionnaires, variables et non anonymisées. Ce qui est un pur scandale. Avec ce nouveau système, on implique que l’exonération peut vraiment se faire avant l’inscription et qu’elle ne relève pas d’une simple décision arbitraire de la Présidence mais d’une commission (le FSDIE Aides sociales) où siègent des étudiant-e-s et où les dossiers sont anonymisés. En réalité, il n’y a pas d’autonomie ici si ce n’est qu’on calque la procédure d’exonération sur les aides individuelles FSDIE. Cette mesure est donc très positive même si il faut rester vigilant.
…mais un système de plus en plus inégalitaire
Cependant, il y a plusieurs mesures qui, plutot que de simplifier réellement quoi que ce soit, vont compliquer la vie de certain-e-s étudiant-e-s. APB affichera désormais les chances de réussite pour chaque offre de formation. Cela ne va avoir qu’une seule conséquence :
renforcer l’autocensure lors de la formulation des voeux APB, ce qui affecte bien évidemment les lycéen-ne-s issu-e-s de lycées peu réputés ou mal classés*. Ensuite, la « prise en compte des équipements personnels des étudiant-e-s » nécessite une certaine vigilance : la mixité sociale est, n’en déplaise à certain-e, présente dans les universités françaises, bien que pas assez. Cela signifie que tous et toutes ne sont pas égaux et égales en matière d’équipement personnel, donc attendre des étudiant-e-s l’utilisation de certains appareils est socialement discriminant, tant que les universités ne sont pas pretes à en fournir à tous et toutes (et si elles le pouvaient il y aurait autre chose à faire avec cet argent).
On n’a là que les mesures concernant les étudiant-e-s, les autres concernent les enseignant-e-s, les chercher-euse-s, et les directions d’université.
On notera un passage facilité des COMUE aux Responsabilités et Compétences Élargies. C’est-à-dire que ce en quoi consistait la LRU**, une autonomisation des facs ayant pour but de leur faire réduire encore et toujours leurs dépenses, va etre appliqué à des regroupements d’établissements, qui arrivent à etre encore moins démocratiques. Concrètement, il n’y aura toujours pas plus d’argent pour les universités, mais la gestion des budgets va devenir de plus en plus opaques.
*Classement des lycées qui sont largement à relativiser, du fait de la sélection qu’exercent un certain nombre de ces lycées.
**Loi relative aux libertés et responsabilités des universités, à l’origine d’un mouvement de contestation important de 2007 à 2009.