Suite à des soirées étudiantes encourageant les comportements sexistes et oppressifs Le syndicat Solidaire Étudiant-e-s Grenoble a fait voter la charte suivante à l’université Joseph Fourier.
Plus d’information sur leur site :
https://solidairesetudiantsgrenoble.wordpress.com/2015/05/05/actualites-de-la-campagne-antisexiste-de-solidaires-etudiant-e-s-dans-les-universites-de-grenoble/
Charte anti-sexiste de l’Université Joseph Fourier
Avant-Propos
Cette charte se focalise sur le sexisme, mais s’applique à toutes formes d’oppressions sur des communautés ou minorités.
Reconnaître et dénoncer les oppressions sexistes :
Les oppressions sexistes sont réelles. Ce n’est pas parce que les femmes ont le droit de vote que le machisme, la misogynie, et le système patriarcal en général ont disparu. L’Université, dans son statut particulier de lieu d’échange et de mélange de travailleur-euses en formation, n’est pas épargnée par le sexisme ambiant. Il est de notre devoir, en tant qu’étudiant-e-s, de faire preuve d’esprit critique face à un système oppressif. Nous ne pouvons pas cautionner ces agissements et devons tendre à une Université meilleure, accessible et sûre pour toutes et tous.
Le sexisme : c’est une attitude discriminatoire adoptée en raison du sexe.
La critique du sexisme dénonce l’idée selon laquelle les caractéristiques différentes des deux genres masculin et féminin impliqueraient l’attribution de rôles, droits et devoirs distincts dans la société. Elle dénonce cette construction de la société qui attribue un caractère, un rôle, des prédispositions physiques et affectives selon le sexe. La notion de sexe n’est alors plus une notion de sexe biologique (mâle et femelle) mais une construction sociale du genre féminin et du genre masculin limitant par là même le développement de l’individu sur les plans personnel, affectif, professionnel et social.
- Discriminations dans le travail : les femmes peuvent être enceintes et donc ne sont pas forcément embauchées, ou alors sont obligées de garantir qu’elles ne prévoient pas de grossesse ; écart salarial à temps de travail égal de plus de 25% (selon l’Observatoire des Inégalités) ; plafond de verre ne permettant pas d’accession à des postes supérieurs et d’encadrement, a des promotions, des augmentations ; harcèlement moral et sexuel de la part des supérieurs ou des pairs masculins.
- Oppressions dans la vie publique : harcèlement de rue, qui est la preuve et le symptôme de la domination masculine dans la société et donc dans l’espace public (le rendant « interdit » aux femmes pendant la nuit par exemple); réification des femmes et matraquage publicitaire, diktats esthétiques et comportementaux qui leur imposent d’être constamment désirables, prêtes à assouvir les désirs des hommes, dans une vision binaire de la Mère ou la Putain, vision véhiculée par les représentations féminines stéréotypées dans les médias ; une femme sur dix a été ou sera violée durant sa vie, à savoir qu’une grande partie des viols et agressions sexuelles ne sont pas déclarées aux autorités, et que 96% des auteurs de viol sont des hommes et 91 % des victimes sont des femmes (source : Planetoscope)
- Oppressions dans la vie privée : une femme meurt tous les trois jours sous les coups de son conjoint (un tiers des viols commis en France le sont au sein d’un couple), et c’est 400 000 femmes qui sont victimes de violences conjugales chaque année ; les inégalités dans la répartition des tâches domestiques subsistent, le travail ménager et l’éducation des enfants échouant ainsi de manière quasi systématique aux femmes.
- Discriminations à l’Université : filières prestigieuses à dominante masculine car considérées comme «pour les hommes» ; absence de prise en compte du harcèlement sexuel et moral, et déni du vécu des victimes lors d’agressions sexuelles ; manque d’accessibilité à des soins comme l’IVG, la contraception, par précarité ; sexisme dans des organisations du campus, notamment lors d’évènements festifs, bizutage, culture du viol omniprésente ; stéréotypes sexistes dans des cours proposés à l’université, dans la communication d’événements publics.
Les associations étudiantes, les bureaux étudiants, syndicats ( d’étudiant-e-s et de travailleurs-euses salarié-e-s) et institutions universitaires, en tant qu’actrices prépondérantes de la vie universitaire, sont les plus à même à agir pour renverser le climat oppressant qui règne à l’université. Les organisations signataires s’engagent donc à reconnaître la réalité du sexisme et de l’oppression patriarcale, de favoriser la sensibilisation sur ses questions, d’aider et d’accompagner les victimes du harcèlement et enfin de refuser, de véhiculer de quelques manière que ce soit les préjugés sexistes, tels qu’ils sont définis dans cette charte, dans quelque but que ce soit. Agir concrètement dans son établissement contre ces comportements
1. Soirées et manifestations festives
1.1.L’importance d’une communication sans sexisme
Les médias de masse, de par leur omniprésence dans l’espace et le public large qu’ils visent, ont un impact certain sur les personnes qui y sont confrontées. L’importance de la publicité, et plus largement de la communication dans notre société est telle qu’on ne peut nier que ces représentations entretiennent un certain modèle de société, et même contribuent à le modeler. Il est donc nécessaire de prêter attention aux représentations publiques de ce que l’on propose, en termes d’évènements. En affichant publiquement un contenu sexiste, on en banalise le message et laisse penser que cette attitude est acceptable, voire la norme. Il est donc nécessaire de ne pas être sexiste, que ce soit dans des affiches, des tracts ou flyers, sur un site internet ou sur les réseaux sociaux.
1.2. Prévention des risques durant ces évènements
En banalisant des messages sexistes, on banalise également les comportements qui vont de pair, “autorisant” les actes dégradants voire dangereux durant les soirées. Ainsi des hommes se sentiront permis de ne pas respecter le consentement de femmes non-intéressées, en niant leur ressenti.A l’inverse des femmes se sentiront obligées de correspondre à ce que l’on attend d’elles, obligées d’êtres attirantes et ouvertes sexuellement pour ne pas passer pour des prudes; sachant que des hommes aussi pourraient être mal à l’aise dans cette virilité exacerbée imposée. Les agressions sexuelles sont une réalité durant les soirées étudiantes, ainsi 20% des étudiantes ayant suivi un cursus universitaire en ont subi ou en subiront (source : Slate). Une solution est de proposer des clés de compréhension sur le consentement et les agressions sur les sites des organisations en charge de la soirée, en proposant des liens vers des sites comme celui du CLASCHES (Comité de Lutte Anti-Sexiste Contre le Harcèlement dans l’Enseignement Supérieur). Il est également souhaitable, sinon indispensable de former les membres des organisations à ces questions. Informer des dangers des substances psycho-actives, mettre a disposition des ethylotests gratuits, des bouchons d’oreille, des boissons sans alcool gratuites, de la nourriture gratuite, mettre à disposition des préservatifs gratuits mais aussi créer un espace calme au chaud avec de l’eau et des chaises pour se reposer durant une soirée, sont des choses à mettre en place durant ces événements (comme cela se fait dans certains BDE). Des formations aux premiers secours sont régulièrement proposées sur le campus, auxquelles il est souhaitable d’assister.
2. Passation de pouvoir d’un bureau à un autre
2.1. Des formations anti-sexistes incontournables
On ne peut que regretter le manque de formation et de sensibilisation sur les questions de sexisme dans l’université en général, cependant, il est possible de s’auto-former (des centaines d’ouvrages ou de sites internet antisexistes sont disponibles gratuitement). Une formation de la part de militant-e-s antisexistes impliqué-e-s (venant de syndicats, d’associations, de collectifs, etc) qui maitrisent le sujet est tout à fait envisageable, et même préférable car elle permet d’installer un dialogue et de mieux aider à la compréhension du sexisme. Dans tous les cas, il est essentiel de se former sur ce thème afin de ne pas reproduire de comportements oppressifs et sexistes à grande échelle.
2.2. Un devoir d’information et de sensibilisation des membres
Il va de soi que les membres d’une organisation déjà formé-e-s sur le sexisme ont le devoir de former les nouveaux-elles membres, et cela tout au long de l’année. Cela peut être fait par le biais d’une réunion, mais aussi d’une projection-débat ou d’une campagne (sur les violences faites aux femmes par exemple), qui peut d’ailleurs s’étendre à l’ensemble des étudiant-e-s d’une promo, d’une filière ou d’une université.
3. Sanctions et pénalités encourues par un non-respect de la charte
3.1. Au niveau de l’évènement lui-même
Avant toute action publique, en cas de non-respect de ladite charte, l’organisation responsable de l’évènement sera contactée directement afin d’instaurer un dialogue et de trouver un accord à l’amiable. En cas de décision du maintien de l’évènement selon les mots-d‘ordre sexistes originels, celui-ci sera annulé et toute forme de communication publique devra être supprimée. En cas de décision du maintien de l’évènement en modifiant les mots-d’ordre et de la communication, la soirée pourra être maintenue.
3.2. Au niveau de l’administration de l’établissement
En cas de non-respect de ladite charte, l’organisation responsable de l’évènement se verra supprimer les subventions que l’université lui alloue (fonds FSDIE, etc).
Mise en œuvre de la charte :
Les organisations successives s’engagent à mettre en œuvre et à faire appliquer la présente charte. Le ou la président-e nouvellement élu-e de chaque organisation la remettra signée au directeur de l’école dès sa prise de fonctions.
La charte signée des deux parties sera remise à chaque nouveau-elle résident-e lors de l’entrée dans les lieux.
La charte sera présentée et commentée par les organisations à l’ensemble des nouveaux-elles étudiant-e-s pendant la semaine d’intégration.
Cachet de l’organisation, avec date et signature, précédé de la mention «vu et adopté».
Cachet de l’administration, avec date et signature, précédé de la mention «vu et adopté».